Les Carrières de Lumières : appréhender l'art autrement
- S.N.Blaster
- 23 févr. 2018
- 5 min de lecture
Comment pouvons-nous essayer d’aborder et d’apprécier l’art d’une manière différente ? À travers quels procédés pouvons-nous le rendre plus « accessible » pour une majorité de la population ? Voici deux questions absolument passionnantes qui, vous aussi, vous ont peut-être déjà traversé l’esprit.
L’art est une forme d’expression résultant d’un pur artifice humain, mais qui s’avère en définitive être une notion extrêmement complexe à appréhender, à comprendre et à apprécier pour la plupart des personnes. Il serait alors intéressant d’envisager des « nouveaux concepts » dans l’optique de rendre cette expression artistique supposément plus accessible, tout en conservant sa valeur, sa portée et sa diversité.
L’une des nombreuses réponses possibles à ces deux interrogations pourrait bien être « Les Carrières de Lumières » : un site culturel proposant un équipement multimédia, et diffusant un contenu artistique, tout à fait incroyables et uniques en France. La réouverture annuelle étant prévue pour ce vendredi 2 mars 2018 - elle s’effectuera à travers l’arrivée de nouveaux spectacles totalement inédits -, voilà une belle occasion de venir faire une sortie culturelle enrichissante dans le Sud du pays, plus précisément dans le département des Bouches-du-Rhône (13).
Mais à ce moment-là, que sont réellement ces « Carrières de Lumières » ?

AVANT CELA... UN PEU D’HISTOIRE
C’est au XIXe siècle que la carrière des Grands Fonds, aujourd’hui connu sous le nom de Carrières de Lumières, vit le jour dans le village Les Baux-de-Provence - une pittoresque commune provençale perchée sur des falaises dominant la vallée qui accueille, un peu plus loin, la ville d’Arles. Nous sommes alors en plein développement industriel, ce qui implique la construction de nombreux bâtiments tels des entrepôts, des gares ou bien des usines, qui étaient majoritairement faits de pierre à cette époque.
Cependant, peu de temps avant la Seconde Guerre Mondiale, de nouveaux matériaux plus économiques - béton, acier... - sont découverts avec les progrès scientifiques et sont alors utilisés en masse, induisant l’inévitable déclin de la pierre de construction. La carrière ferma en 1935.
C’est en 1959 que, pour la première fois, la carrière fut utilisée à des fins artistiques. Le génie visionnaire de Jean Cocteau - poète, dramaturge, graphiste, dessinateur et cinéaste français - permit de trouver un second souffle à ce lieu si particulier. Émerveillé par la beauté unique des carrières et de ses environs, l’académicien décida d’y tourner son film « Le Testament d’Orphée ». Les années 70 furent ensuite le précurseur de recherches et du développement de nouveaux projets concernant la transformation et l’utilisation de ces grands espaces, jusqu’alors presque à l’abandon.
En 2012, le conseil municipal prit la décision de déléguer la gestion du site à Culturespaces, une entreprise privée fonctionnant sans subventions publiques, spécialisée dans la gestion et la dynamisation de monuments historiques, de musées et de centres d’arts - s’efforçant d’agir avec éthique et professionnalisme depuis plus de 25 ans. C’est à partir de cette étape cruciale que les carrières prirent le visage que nous leur connaissons aujourd’hui.

« Monet, Renoir... Chagall - Voyages en Méditerranée » 2013
LE CONCEPT
Il s’agit d’un concept unique, développé et produit par Culturespaces, employant la technologie AMIEX « Art & Music Immersive Experience ». Ce sont des spectacles audiovisuels projetés sur le sol, les murs et les piliers de la carrière à l’aide d’une installation numérique complexe composée d’une centaine vidéo-projecteurs très performants et d’un système de son spatialisé.
Les parois de pierre calcaire blanche - atteignant les 15 mètres de hauteur - se métamorphosent alors en immenses toiles de maîtres, précipitant aussitôt les sombres cavernes rocheuses dans un rêve fantasmagorique qui s’étend sur presque dix-mille mètres carrés.

« Monet, Renoir... Chagall - Voyages en Méditerranée » 2013
Ces représentations sont réalisées à partir de plusieurs milliers d’images d’œuvres d’art numérisées qui sont diffusées en très haute résolution et animées au rythme de la musique afin d’offrir un scénario visuel et auditif plein d’émotions, tout en poésie.
Les expositions reposent majoritairement sur la dématérialisation d’œuvres picturales et leur projection sur de grandes surfaces ; elles sont conçues sur-mesure afin d’épouser parfaitement l’architecture du site tout en sublimant sa beauté minérale naturelle.

« Bosch, Brueghel, Arcimboldo - Fantastique et merveilleux » 2017
Dès l’apparition de la première image et le retentissement de la première note, le spectateur se retrouve totalement immergé dans l’« illustration » et dans la « musique ». Il s’embarque alors pour une aventure sensorielle époustouflante qui renouvelle l’approche des plus grands noms de l’histoire de l’art. Parmi les spectacles déjà exposés par le passé, nous pouvons retrouver le travail de certains des plus célèbres peintres ayant existés, tels que Gaugin, Van Gogh, Monet, Michel-Ange ou encore Bosch - et bien d’autres encore.
Les expositions immersives sont entièrement produites par Culturespaces qui prend également en charge leur diffusion, ainsi que la gestion du site. Elles sont confectionnées par les réalisateurs Gianfranco Iannuzzi, Renato Gatto et Massimiliano Siccardi. Les effets sonores ainsi que la musique qui accompagnent les images sont réalisés par le compositeur Luca Longobardi.
Ces spectacles annuels projetés pendant 10 mois - de mars à janvier de l’année d’après - au sein des Carrières de Lumières s’imposent aujourd’hui comme l’une des plus grandes installations multimédia fixes au monde.

« Michel-Ange, Léonard de Vinci, Raphaël - Les géants de la Renaissance » 2015
Nous sommes face au parfait exemple de ce que le mariage de l’art et du numérique peut accomplir. La technologie est ici au service des œuvres et s'efface dès le début du spectacle pour laisser place à de nombreuses sensations et à l'émotion esthétique.
De nos jours, avec l’évolution de la société et tous les éléments que cela implique, on ne s’approprie plus l’art et la culture comme on pouvait le faire jadis. Les pratiques et les esprits évoluent inéluctablement, alors peut-être faut-il adapter les méthodes de diffusion et d'exposition des œuvres culturelles et artistiques ?
Il s’avère que nous assimilons les choses bien plus efficacement à travers le divertissement, les émotions et les expériences immersives. La simple contemplation ou le caractère « passif » que peuvent posséder certaines formes d’expression artistique ne sont plus vraiment en phase avec le mode de fonctionnement des individus modernes ; je pense notamment à la peinture, la sculpture ou encore l’architecture qui se reposent sur une concentration purement visuelle, ne sollicitant pas d’autres sens ou actions.
Alors voici sans doute la solution, la réponse que l’on pourrait apporter au silence parfois gênant qui envahit les salles de musée ; à la peur de s’ennuyer qui peut survenir à l’idée de déambuler durant des heures et sans un mot à travers les couloirs des centres d’arts... jusqu’à peut-être convaincre les plus réticents aux arts de s’y essayer... autrement.
Une seule chose est sûre, les Carrières de Lumières vous plongeront dans une expérience personnelle unique et fascinante, qui vous en fera voir de toutes les couleurs et qui ne pourra vous laisser de marbre.
Elles rouvriront le vendredi 2 mars 2018 avec notamment une exposition annuelle inédite sur « Picasso et les maîtres espagnols » - dont les illustres Goya et Sorolla - et n’auront d’autre objectif que de vous immerger pleinement dans l’univers pictural ibérique du XXe siècle.
Renseignements :

Site Internet des Carrières de Lumières :
Téléphone : 04 90 54 47 37
Réservation pour grands groupes et classes scolaires
Réceptions privées
Accès pleinement assuré aux personnes à mobilité réduite
Animaux non acceptés
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Site Internet de Culturespaces :
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